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Migrants : « Le gouvernement doit faire la lumière sur les pratiques à l’œuvre à la frontière franco-britannique »

Il faut venir à Calais pour s’en rendre compte. Murs, barbelés, grillages, blocs de béton ont remplacé les terrains forestiers dans cette ville où la pauvreté sévit durement et où les habitants vivent dans une prison à ciel ouvert.
Bienvenue en absurdie, où l’arsenal répressif est poussé à l’extrême pour décourager les personnes en situation de migration à s’installer. A Calais, les pires dispositifs sont à l’œuvre pour lutter obstinément contre les « points de fixation » : destruction et vol de biens, détournement des procédures judiciaires, entrave à l’accès à l’eau et à l’aide alimentaire, construction de clôtures, installation de rochers, harcèlement et intimidations.
Depuis la signature des accords du Touquet en 2003, visant à partager la gestion du contrôle des flux migratoires entre la France et le Royaume-Uni, la frontière britannique s’est déplacée à Calais où la police française est devenue le bras armé de la politique migratoire britannique.
Cette technique visant à rendre les territoires situés sur le littoral de la Manche aussi inhospitaliers que possible n’a eu pour effet que de militariser encore plus la frontière. Non seulement cette militarisation n’a pas empêché la hausse des traversées, mais elle les rend plus dangereuses. Pressurisées à Calais, de plus en plus de personnes en situation d’exil tentent à la hâte la traversée en partant du bas du littoral, ce qui augmente la durée de la traversée et les risques de naufrage.
Les conséquences sont dramatiques. Le 3 septembre, douze personnes sont mortes dans la Manche et deux autres sont portées disparues au large de Wimereux, près de Boulogne-sur-Mer. Ainsi, 2024 devient l’année la plus meurtrière à la frontière, selon Utopia 56. Depuis le début de l’année, trente-cinq personnes sont mortes en mer (noyades, chocs thermiques, piétinements…).
Cette situation humanitaire désastreuse nourrit à la fois les réseaux mafieux qui tirent parti de cette misère humaine, mais également les partis d’extrême droite qui voient dans cette désertion de la puissance publique, une occasion d’engranger des voix. Les voix de celles et ceux qui se sentent abandonnés face à la gestion de cette misère humaine, sommés de gérer à leur petite échelle les conséquences des dérèglements du monde.
Cette réalité quotidienne ne fait malheureusement plus la une des journaux, malgré les alertes répétées des associations installées à Calais comme Utopia 56, qui font face à l’horreur sur le terrain et à la surdité au sommet de l’Etat. Tout comme la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) et la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui ont condamné à plusieurs reprises la France, ces associations dénoncent des atteintes intolérables aux droits fondamentaux dont sont victimes les personnes exilées aux frontières françaises.
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